Le Canada a quitté l’Afghanistan en 2014, mais dix après la guerre se poursuit, dans la tête de plusieurs vétérans. Anciens Combattants Canada (ACC) estime qu’au moins 10% des vétérans qui ont été en opération dans une zone de guerre seront atteints trouble de stress post-traumatique (TSPT), alors que d’autres éprouveront au moins certains des symptômes associés à ce trouble. Le TSPT est généralement causé par le fait d’avoir été témoin d’événements traumatisants.
Les chiffres exacts sur la prévalence du TSPT chez les militaires Canadiens sont difficiles à obtenir. Ce que nous savons, c’est que plus de 40 000 militaires ont servi en Afghanistan, ce qui, selon les estimations de ACC, signifie qu’au moins 4 000 anciens combattants ont souffert ou souffrent encore de stress post-traumatique. Ces chiffres sont très conservateurs: aux États-Unis, on estime que le taux de TSPT chez les vétérans est plus près de 16%. Certaines estimations suggèrent que le nombre atteint 40 % si l’on inclut ceux et celles qui ne sont pas diagnostiqués – parce qu’ils ou elles ne cherchent pas de traitement à leur problème. Il va sans dire que la honte est un facteur important.
Le TSPT se caractérise souvent par des cauchemars et des flashbacks au cours desquels les personnes revivent l’événement traumatisant de manière répétée et involontaire. Il s’accompagne d’une peur persistante et d’une anxiété grave. Les personnes souffrant de stress post-traumatique vont bien souvent éviter les lieux, les personnes, les activités ou les objets qui pourraient leur rappeler l’événement traumatisant, ce qui mène bien souvent à l’isolation sociale.
Le TSPT peut causer une détresse importante et interférer avec le fonctionnement quotidien, y compris au travail et dans les relations personnelles. C’est un grave problème de santé publique car il affecte non seulement les individus mais leurs familles et la société en général.
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Je suis un vétéran de l’Afghanistan qui heureusement ne souffre pas de TSPT. Par contre, j’ai vécu dans les deux dernières années des troubles de dépression et d’anxiété qui m’ont amené à éprouver certains des symptômes ressentis par les gens souffrant de TSPT. Sans entrer dans les détails, je peux vous dire que ça rend la vie très, très difficile. La dépression et l’anxiété ont des impacts majeurs sur le fonctionnement au quotidien.
Après avoir caché mon problème de santé mentale pendant 22 longs mois je me suis finalement ouvert à mes amis et mes collègues. À ma grande surprise, la réponse a été incroyablement positive. J’avais honte de ce que je vivais et je pensais sincèrement être jugé par mes pairs. Alors que je pensais à des mots comme « faiblesse » et « couardise » mon entourage m’a répondu avec des termes comme « courage » et « résilience ».
Tout aussi surprenant a été le nombre de vétérans et militaires toujours en uniforme qui m’ont avoué avoir souffert ou souffrir toujours de stress constant et d’anxiété. Selon mes estimés, au moins 30 à 40% des vétérans et militaires en service éprouvent ou ont éprouvé, à une période de leur vie, de problèmes de santé mentale. Un collègue m’a simplement dit « bienvenue dans le club », comme si je venais de découvrir une large société secrète qui existait depuis longtemps en marge de la société que je connais.
M’ouvrir auprès de mon monde a été un pas majeur vers la guérison et, aujourd’hui, je sens que mon problème de santé mentale est chose du passé. Cependant, je ne me fais aucune illusion sur le fait qu’il y a une vulnérabilité en moi qui pourrait un jour me conduire à revivre des jours difficiles.
Je m’ouvre publiquement sur ces problèmes parce que je veux aider à briser le tabou qui règne sur la santé mentale, surtout auprès des vétérans. J’ai réalisé qu’il y a trois audiences bien distinctes pour mes écrits: ceux qui souffrent eux-mêmes, ceux qui aident les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale (les parents, les amis) et ceux qui, encore aujourd’hui, ne comprennent pas ce que c’est que de souffrir de TSPT, d’anxiété ou de dépression.
Cet article est une façon de sensibiliser le public et de rendre hommage à ceux qui ont servi sous les drapeaux et qui en gardent des séquelles.