Les loyaux et les extrêmes

Donald Trump n’a aucune envie d’être « présidentiel »; il l’a démontré pendant ses quatre années à la tête des États-Unis, et il le démontre de nouveau avec la série de nominations de son cabinet.

Les critères recherchés pour les postes clés sont, selon son équipe, la loyauté et la compétence. On s’entend sur un critère: il est clair que Trump cherche des secrétaires loyaux. Pour la compétence, on repassera. Voici quelques exemples:

  • Pete Hegseth à la Défense. Hegseth a été major dans le Army National Guard et a des déploiements opérationnels en Afghanistan et en Irak. A ce compte-là, je suis aussi « qualifié » que lui, ou presque – je ne suis pas allé en Irak – pour être à la tête d’une armée de près de 3 millions de membres et un budget avoisinant le trillion annuel. Non mais sérieusement. Par comparaison, le présent secrétaire à la Défense est un ancien général 4 étoiles. Et les rares secrétaires qui n’avaient pas d’expérience militaire proprement dit dans le passé étaient d’anciens CEOs de multinationales. Hegseth lui est un animateur de Fox News, mais seulement les fins de semaine, là où l’écoute est au plus faible. Trump l’a choisi parce qu’il le trouve télégénique et qu’il a l’air tough. Hegesth s’est déjà mis à dos près de 20% de sa future main-d’oeuvre en disant que les femmes ne devraient pas occuper de rôle de combat. Bien des secrétaires à la Défense se sont plantés dans le passé; bonne chance Pete.
  • Matt Gaetz comme procureur général: le gars a effectivement un diplôme en droit et a pratiqué dans un petit cabinet pendant quelques années, mais son expérience la plus probante vis-à-vis la loi vient du fait qu’il a été sous enquête pour avoir eu une relation sexuelle alléguée avec une mineure. Comme politicien, Gaetz n’a jamais cherché à implanter des politiques importantes mais a plutôt cherché à se faire un nom comme agitateur et grand défenseur des frasques de Trump. Gaetz est une grande gueule, le porte-voix de Trump, en plus d’être détesté profondément par les membres de son propre parti. Il n’a aucune envergure et est, en bon français, un trou d’cul de première.
  • Tulsi Gabbard comme directrice du renseignement national: Gabbard a fait l’apologie de la politique expansionniste de la Russie, une menace existentialiste à la stabilité de l’Occident. Peu de temps après que la Russie ait lancé son invasion de l’Ukraine en 2022, elle a écrit dans un message sur les réseaux sociaux : « Cette guerre et cette souffrance auraient facilement pu être évitées si l’administration Biden/NATO avait simplement reconnu les préoccupations légitimes de la Russie concernant l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. » Préoccupations légitimes?? Poutine a envahi un pays souverain, un allié de l’Occident, dans le plus pur dédain du droit international. Et si on ne l’arrête pas là il se tournera vers les Baltiques. Trump va mettre de l’avant une politique d’appeasement, comme nos dirigeants l’ont fait dans les années 30 devant Hitler, avec toutes les conséquences désastreuses que cela a engendré.

Hegseth, Gaetz et Gabbard sont loyaux, certes, mais ils n’ont aucune compétence pour les postes auxquels ils ont été assignés, et ils sont surtout extrémistes, dans leurs vues. J’espère qu’ils vont se heurter à des institutions fortes, avec des gens éduqués et soucieux des principes et du standing des États-Unis d’Amérique.

En 2016, Trump cherchait à s’entourer de gens compétents afin de l’aider à naviguer les coulisses du pouvoir, mais il s’est vite rendu compte que ses secrétaires n’allaient pas lui obéir au doigt et à l’oeil. Il a appris ses leçons. Cette fois-ci il nomine des extrémistes qui vont tout faire pour mettre en action ses idées les plus extravagantes.

Il y a près de 2000 ans, l’empereur Caligula tentait de faire nommer son cheval comme consul. Depuis, les historiens se moquent de lui en disant qu’il avait complètement perdu la carte, mais je crois qu’il savait ce qu’il faisait. En nommant son cheval consul, Caligula voulait démontrer que le travail des autres consuls n’avait aucune valeur, car seules ses décisions comptaient. Trump est en train de faire la même chose: discréditer les institutions et les potentiels contre-pouvoir en les affublant de clowns sans envergure et sans génie.

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